Quoique je sois femme, j'ose me mêler à ceux qui ont parlé en faveur des Juifs. Quand il s'agit de plaider la cause de la justice, il n'y a plus de distinction de rang ni de sexes ; tout le monde peut également se présenter au Tribunal, et je me présente à celui de la Nation la plus éclairée de la terre.
C'est donc à vous, Français, et à vous sages Législateurs, que j'adresse mes voeux, et que je réclame pour un peuple qui ne vous est point étranger, les droits que vous venez de rendre à tous les Membres de la Société. Vous avez décrété que tous les hommes sont égaux en droits ; et ce décret seul vous rend immortels. Mais tandis que tous les jours sont marqués par quelques nouveaux bienfaits qui émanent de votre sagesse, les Juifs seuls demeurent incertains sur leur sort. Ah ! ne les laissez pas davantage en suspens ! songez combien celui qui entrevoit le bonheur après tant de siècles d'infortunes, de persécutions, de mauvais traitements, est impatient d'en jouir ! songez qu'en couronnant votre ouvrage par cet acte de justice, vous allez répandre la joie dans ces coeurs opprimés par la douleur, et rendre à l'homme ce qu'il a droit d'attendre de vous.