ISEULT
Ô timide héros oublieux de mon rang
Vous n'avez pas daigné saluer votre dame !
Vos yeux bleus sont restés attachés sur la rame.
Osez voir sur mon front la fureur d'un beau sang.
TRISTAN
J'observe le pilote assoupi sur son banc,
Afin que le navire où vient neiger la lame
Nous conduise tout droit devant l'épitalame.
Je suis le blanc gardien de votre honneur tout blanc.
ISEULT
Qu'éclate sans pitié ma tendresse étouffée
Buvez, Tristan. Je suis la fille d'une fée ;
Ce breuvage innocent ne contient que la mort.
ISEULT
Je bois, faisant pour vous ce dont je suis capable.
Ô charme, enchantement, joie, ivresse, remord !
Je renferme l'amour, ce breuvage coupable.