La dernière Aldini - George SAND
Notice.
Les romans sont toujours plus ou moins des fantaisies, et il en est de ces fantaisies de l'imagination comme des nuages qui passent. D'où viennent les nuages, et où vont-ils?
J'ai rêvé, en me promenant à travers la forêt de Fontainebleau, tête à tête avec mon fils, à toute autre chose qu'à ce livre, que j'écrivais le soir dans une auberge, et que j'oubliais le matin, pour ne m'occuper que des fleurs et des papillons. Je pourrais raconter toutes nos courses et tous nos amusements avec exactitude, et il m'est impossible de dire pourquoi mon esprit s'en allait le soir à Venise. Je pourrais bien chercher une bonne raison; mais il sera plus sincère d'avouer que je ne m'en souviens pas: il y a de cela quinze ou seize ans.
Première partie.
A cette époque-là, le signor Lélio n'était plus dans tout l'éclat de sa jeunesse; soit qu'à force de remplir leur office généreux, ses poumons eussent pris un développement auquel avaient obéi les muscles de la poitrine, soit le grand soin que les chanteurs apportent à l'hygiène conservatrice de l'harmonieux instrument, son corps, qu'il appelait joyeusement l'étui de sa voix, avait acquis un assez raisonnable degré d'embonpoint. Cependant sa jambe avait conservé toute son élégance, et l'habitude gracieuse de tous ses gestes en faisait encore ce que sous l'Empire les femmes appelaient un beau cavalier.
Mais si Lélio pouvait encore remplir, sur les planches de la Fenice et de la Scala, l'emploi de primo uomo sans choquer ni le goût ni la vraisemblance; si sa voix tout jours admirable et son grand talent le maintenaient au premier rang des artistes italiens; si ses abondants cheveux d'un beau gris de perle, et son grand oeil noir plein de feu, attiraient encore le regard des femmes, aussi bien dans les salons que sur la scène, Lélio n'en était pas moins un homme sage, plein de réserve et de gravité dans l'occasion.
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La dernière Aldini - George SAND
TABLE DES MATIERES
Notice.
Première partie.
Deuxième partie.
{Editions altifagiennes}