Gustave Flaubert naquit, en 1821, à Rouen, où son père était chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu. Il fit brillamment ses classes et commença l'étude de la médecine. Mais ses goûts et ses aptitudes le portaient irrésistiblement vers la carrière des lettres.
Le romantisme brillait de toute sa splendeur. Flaubert fut éperdument romantique. Il se sentait une surabondance de forces vives, qu'il brûlait d'épancher en généreux efforts. Il fit des vers. Il avait pour camarade Louis Bouilhet ; et tous deux, jeunes, passionnés, enthousiastes, insouciants et fiers, ils allaient à travers champs, traçant, dit-on, et marquant de leur sang sur l'écorce des arbres le nom de Victor Hugo. Le chirurgien en chef mourut en 1846 ; il laissait à son fils une fortune plus que suffisante, une indépendance complète.
Riche, libre, épris de l'art, Flaubert voyagea. De 1848 à 1852, il visita l'Italie, l'Egypte, la Palestine, l'Asie Mineure. Quand il revint, l'Empire était fait. En 1856, i1 publia Madame Bovary. Comment le poète épris des splendeurs idéales était-il devenu l'implacable prosateur de la réalité ? Les fleurs de la première jeunesse étaient tombées. Dans la patrie désenchantée, l'audacieux chercheur revenait, mordu, lui aussi, par le poison subtil et violent de la désillusion.