La vaste cuisine de ferme tiède après le dîner ; où sétirent les ombres sur le carreau rose, où la vieille servante droite et plate essuie la vaisselle tintante ; là Cyrille vient sasseoir cette veillée dhiver.
Il pense à Trouville, aux mois des dernières vacances, à Denise. Son cousin, ce noceur, les avait unis solennellement, un matin, devant la mer plumetée, tandis que ruisselait lharmonieuse voix des eaux, tandis que riait cette fille aux cheveux teints. Et suivit une folle excursion en barque où elle le serrait à la taille en lui disant des bêtises : « Potache, potache. Oh ! que tes farce, petit potache. » Ce lui sonne encore. Elle épela « Institut Saint-Vincent » sur les boutons de son uniforme ; car, sorti depuis cinq jours de chez les Pères, un tailleur navait pu le pourvoir de vêtements civils.
Et dans cette chair duveteuse, dans ces cheveux teints gros et drus, il vécut des semaines. Les heures passées hors des étreintes, il ne les sait plus.
Laima-t-elle cette femme de Paris, échouée là pour faire la plage ? Si bête quelle ne parlait même pas, si robuste quelle le faisait geindre en le lacis de ses bras doux, lui le rude fils de paysans et de chasseurs. Elle lahurit de ses parfums brusques, de ses dentelles infinies, de ses soieries et de ses mousselines.
En Italie. Comme ça. Parce quil avait encore dans la tête Virgile, lhistoire, les gondoles de Venise, Cicéron, le Forum. Ils étaient partis avec largent dun usurier, un ami delle. Sans hésitation lui conclut cet emprunt, malgré sa raison morigénante. Et puis, à Milan, un midi, elle se leva terriblement fâchée, cassa les porcelaines de la toilette, lui prit son portefeuille et, par le premier train, fila sur Paris. Pourquoi ? Elle était ivre-morte depuis trois jours.
Alors il fallut revenir.